L’alternance gauche/droite : il faut bien que ça serve à quelque chose ...
Publié le 24 avril 2007
L’objet de ce texte n’est pas de dresser une énième liste des méfaits des pouvoirs successifs de gauche ou de droite, mais plutôt la mise en lumière du bénéfice que peut tirer le capitalisme des alternances politiques.
En effet, ne sortiront vainqueurs du futur scrutin présidentiel que le chef de l’État fraîchement élu... et le capitalisme. Ce dernier, sorte d’hydre poly-céphale, se satisfait de la social-démocratie comme du conservatisme ; mieux encore, la succession de ces deux options politiques au pouvoir lui permet une relative stabilité (aussi bien dans son fonctionnement propre que dans la gestion du mécontentement qu’il génère). La gauche et la droite ont des positions divergentes mais non contradictoires à propos des taux de pressurage, de redistribution, des échanges... Il en sort néanmoins un lieu commun : la défense des intérêts de la classe possédantes et du système d’exploitation de l’homme par l’homme. Voyons maintenant quelles sont les tâches distinctes des gouvernements "conservateurs" et "progressistes" dans la pérennisation du système.
Le rôle de la droite est d’être utilisée comme le bras politique de la bourgeoisie. C’est elle qui couche sur papier (et de manière très légale !) les aspirations à plus de libéralisme, d’exploitation, de plus-value... et par là même contente ses confrères de classe. La droite attaque frontalement et sans complexe le droit du travail, les libertés individuelles et collectives, etc. (elle nous l’a montré récemment). En tant que servante d’une certaine frange de la population, elle ne s’encombre pas d’un pseudo "intérêt général" souvent invoqué par la gauche et dévoile sans fausse pudeur ses muscles lorsque le patronat le lui ordonne. Bref, la droite fait preuve de brutalité et d’opiniâtreté : elle peut y aller franco selon les bons vouloirs de la conjoncture économique, jusqu’à ce que la désapprobation populaire se fasse sentir.
Et c’est à ce moment précis que les "progressistes" arrivent à la rescousse du capital. Car la fonction de la gauche réside dans le fait de pacifier les tensions sociales occasionnées par les assauts de la droite. La bourgeoisie est donc prête à concéder une période de social-démocratie "policée et pragmatique" afin d’abreuver la plèbe de discours démagogiques et rassurants. Alors, on tente de nous faire croire à d’hypothétiques bricolages théoriques ayant chacun une importance salvatrice quant au sort des petites gens. Ainsi, pour reproduire le nouveau concept de la néo-gauche inoffensive qui incarne et défend un "capitalisme à visage humain", je répondrai que c’est un non-sens car le capitalisme a le visage des nantis, que cette même gauche contribue à servir. Qui plus est, les bourgeois ont investi les appareils de gôche (notamment celui du PS) et des lignes social-libérales coriaces font leur chemin, sans pour autant que les porteurs de ces idées craignent une quelconque accusation pour hétérodoxie (n’était-ce pas déjà le cas à l’époque des TUC, CIP, emplois jeunes ?...).
Ce moment de tromperie que constitue la gauche au pouvoir permet aux politiciens ventrus d’une droite obstinément anti-sociale d’échafauder les stratégies et les projets obscènes qu’ils nous imposeront une fois passée la prochaine élection suprême. Car, bien sûr, la "famille politique" au pouvoir récolte rarement les honneurs de la cité tandis que l’opposition fait ses choux gras des erreurs des dirigeants : perpétuant par là le mythe du "votez pour nous, on fera mieux". Et ainsi de suite, retour à la case départ.
Mais ne nous y trompons pas : les partis de droite et de gauche n’ont pour fonction que de faire perdurer un système capitaliste inégalitaire et bestial. Malgré quelques petits désaccords de façade, ils sont liés par une ambition commune : servir le monstre dont seule la masse des opprimés pourra couper les sept têtes.
Rosa de Caen