NAPOLÉON LE TRÈS PETIT
Publié le 8 décembre 2014
Nous eûmes tout d’abord Napoléon, un tyran sanglant. Puis nous avons eu Napoléon-le-Petit, mi-pantouflard mi-dictateur. Notre temps est celui de Napoléon-le-Très-Petit, celui d’un autoritarisme « fort avec les faibles, faible avec les forts ».
Le premier eut Madame de Staël et François-René de Chateaubriand pour critiques inspirés. Victor Hugo fustigea Napoléon-le-Petit en des vers magnifiques. Le nôtre, ‘Poléon-le-Très-Petit, doit se contenter de Valérie Trierweiler qui le ridiculise dans un best-seller devenu maintenant international. On a les critiques que l’on mérite.
C’est que, dans l’histoire « Hollandaise », les batailles d’alcôve opposant des femmes blessées par sa cuistrerie ont remplacé les batailles tout court. On ne regrettera pas la disparition des guerres, mais on aurait pu très bien se passer du machisme baveux de Moi-Président.
Il y a cependant des batailles que Napoléon-le-Très-Petit mène avec obstination. Celles contre les sans-dents par exemples, opprimés un peu plus chaque jour. Ou contre les ouvriers, aux conditions de travail et de vie de plus en plus pénibles. Ou encore contre les zadistes, auxquels il n’hésite pas à faire crever les yeux, éclater le visage, exploser un membre ou arracher la colonne vertébrale, en faisant employer à ces troupes des armes de guerre et avec le mépris le plus total pour les blessés ou le mort.
Ici, un autre rappel historique, bien plus proche, s’impose.
Voici un peu moins de 30 ans, le 6 décembre 1986 précisément, Malik Oussékine était tué par la police. Les plus jeunes des manifestants d’aujourd’hui n’étaient pas encore nés. Jusqu’à Rémi Fraisse, Malik Oussékine a été, en France, le dernier être humain abattu dans une manifestation. A l’époque, c’était celle conte la réforme universitaire dite Devaquet. Les exécutants des basses œuvres ont été deux « voltigeurs » (gang policier légal, qui fonçaient sur les manifestants en moto, l’un pilotant l’engin, l’autre, à l’arrière, muni d’une longue matraque, frappant violemment tout le monde sur son passage).
Malik Oussékine mort, le pouvoir eut l’honnêteté de reconnaître immédiatement qu’il s’agissait d’une bavure policière inadmissible et d’en tirer les conclusions qui s’imposaient : Jacques Chirac (premier ministre) retirait la loi contestée et dissolvait définitivement les voltigeurs. Devaquet, démissionnait. Un des deux policiers était mis à la retraite d’office et condamné à 5 ans de prison (tout de même avec sursis), l’autre déplacé et condamné à 3 ans (avec sursis aussi). Le président de la république (François Mitterrand), accompagné du prix Nobel Elie Wessel se rendaient dans les 48 heures chez les parents de la victime pour leur présenter les condoléances de la Nation.
Quelle différence ! Rémi Fraisse mort, Hollande, Valls, Cazeneuve cachent pendant 48 heures la vérité qu’ils connaissent parfaitement. Valls, Cazeneuve - eux qui reprochent sans cesse à leurs opposants de parler avant que « la justice n’ait fini son travail d’enquête » - déclarent aussitôt d’une seule voix qu’il n’y a pas eu de bavure policière. Ils laissent calomnieusement entendre que, peut-être, Rémi s’est fait sauter tout seul. Ils maintiennent en exercice le gendarme lanceur de la grenade tueuse. Quand au projet de barrage de Sivens, après les tergiversations d’usage pour noyer le poisson, malgré son inutilité manifeste et l’accumulation d’illégalités, il est maintenu. Et Hollande-le-Très-Petit ne daigne pas se déplacer chez les parents de la victime.
Nous ne tenons pas Mitterrand et Chirac pour de « Grands Hommes ». Nous ne croyons d’ailleurs pas aux « Grands Hommes ». Mais, ce qui est sûr, c’est que s’il n’y a pas de grands hommes, il en existe des petits. Des très petits. Des minables.