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Exode syrien

Publié le 19 septembre 2015

  FACE A L’EXODE, MOBILISONS-NOUS !

En ces temps de crise où les affaires stagnent, il est un commerce particulièrement florissant  : celui des armes. L’Europe occidentale (et la France notamment) s’y livre avec un succès certain et s’y taille une part non négligeable du marché mondial, trouvant des acheteurs chez tous – ou presque – les dictateurs de la planète ; les plus sanglants étant en général les meilleurs clients.

Or, aussi curieux que cela puisse paraître, la vente d’armes aux dictateurs ne prépare pas spécialement la paix, même si les dirigeants européens feignent, maintenant, l’étonnement devant l’ampleur de la vague des réfugiés qui viennent frapper à leurs portes pour demander asile.

Depuis la seconde guerre mondiale, on n’avait pas vu de flux migratoire aussi important. Les interventions militaires en Irak et en Lybie ont plongé les populations de ces pays dans un enfer durable, l’absence de soutien à la révolution syrienne (alors qu’elle était encore largement laïque et démocratique) a conduit à son écrasement. Les contestataires ont été rapidement supplantés par des islamistes d’obédiences diverses, les pires étant le tristement célèbre DAESH (dont l’armement proviendrait d’au moins 27 pays différents…).

Que les dirigeants occidentaux, au même titre que les lobbys de l’armement et du pétrole, portent la lourde responsabilité du chaos moyen-oriental, cela ne fait aucun doute. Pour faire un semblant d’amende honorable, ils pourraient au moins accueillir tous les réfugiés, leur accorder l’asile, comme l’on s’acquitte d’une dette en quelque sorte. Mais on le pressent bien, les contrats d’armement ne stipulent pas que les vendeurs soient tenus d’accueillir les réfugiés, « conséquences » pourtant incontournable de toute guerre.

Au pays du fric-roi, à Money-Land, la honte et la culpabilité n’ont pas pignon sur rue : on peut susciter des guerres pour défendre ses petits intérêts, on se soucie comme d’une guigne des conséquences de ses choix politiques et militaires. On fait des affaires, un point c’est tout. Et quand, bien malgré soi, il faut essayer de réparer un peu les dégâts, on compte encore sou après sou : ces réfugiés, combien ça coûte ?

L’inquiétude purement comptable de nos avaricieux bons maîtres se double aussi d’une angoisse électorale  : combien de bulletins de vote en moins si, par mégarde, nous nous montrions trop généreux envers ces « étrangers »  ?

Comme d’habitude, ce qui préoccupe gravement nos bien-aimés dirigeants, ce n’est pas du tout le devenir de tous ces réfugiés, c’est leur propre avenir politique, leur carrière, leurs intérêts et ceux de leurs amis marchands de boniments médiatiques, de canons ou de pétrole.

Depuis janvier, ce sont 340 000 migrants ou réfugiés qui se pressent aux portes de l’Europe  : 230 000 venant d’Afghanis-tan, d’Irak et de Syrie par la route des Balkans et 110 000 venant d’Afrique par la Libye vers les côtes italiennes. Au seul mois de juillet, 107 000 ont été recensés. Actuellement, chaque jour, 2 à 3000 réfugiés arrivent en Macédoine.

On assiste donc à un phénomène migratoire exceptionnel et il faut remonter aux flux migratoires de la Seconde guerre mondiale pour retrouver des seuils aussi élevés ; c’est dire l’intensité des combats (notamment en Syrie et en Irak) qui jettent sur les routes tous ces gens.

Rappelons que 250 000 Syriens sont morts en trois ans de guerre et que 4 millions se sont réfugiés dans les pays limitrophes (Turquie, Jordanie, Liban).

Dépassés par l’afflux de ces fugitifs, nos bons maîtres ont retrouvé cependant assez vite leurs réflexes de marchands et de policiers : on recense, on trie et on vire. Il s’agit de séparer les bons des mauvais : les réfugiés politiques d’un côté, les migrants économiques de l’autre. Aux réfugiés politiques on accordera le droit d’asile (mais tous ne seront pas « élus », loin de là), à ceux dont la motivation est moins « noble » on opposera la « fermeté », c’est-à-dire le retour à la frontière comme seul horizon. Il faut signaler que parmi les « migrants économiques » on compte un grand nombre de victimes d’une autre guerre, celle de l’ex-Yougoslavie qui a détruit pour de longues années le tissu économique ; le chômage de masse sévit maintenant dans les nations nouvellement crées, tandis que les élites nagent dans l’opulence due à la corruption.

Les bénéficiaires du droit d’asile se voient allouer la somme mirifique de 91 euros par mois et par personne s’ils sont logés, et 343 euros s’ils doivent se loger. On ne peut que rester pantois devant une telle générosité. Le demandeur d’asile attend de 7 à 8 mois avant de savoir si sa demande est acceptée ou rejetée ; en cas de réponse positive, il ne peut chercher du travail qu’au bout de 6 mois minimum.

Alors que des centaines de milliers de personnes arrivent, l’Europe – au moment où cet article est rédigé – s’apprêterait à accorder cette année 40 000 droits d’asile (peut-être plus, on peut l’espérer). Encore faudrait-il veiller, nous dit-on, à une « répartition équitable » des réfugiés dans les divers pays. Entre responsables bien nourris, bien logés et bien vêtus, les discussions risquent de durer...

La Hongrie de Viktor Orban édifie une immense barrière de barbelés à la frontière avec la Serbie, fait évacuer la gare centrale de Budapest où des milliers de réfugiés attendent le train en direction de l’Allemagne, pour la rouvrir le surlendemain, puis stopper leur train au bout d’une centaine de kilomètres : un jeu sadique avec des gens déjà fortement éprouvés. La répression policière n’est pas le seul apanage des régimes nationaux populistes et on a pu voir la police française montrer son « savoir faire » (en terme de matraquage) à des migrants tentant de monter à bord de camions en route pour l’Angleterre à partir de Calais.

Entre fausse compassion et vraie répression, le curseur oscille au gré des vents politiques, mais les rhétoriques démocratiques et humanistes des dirigeants européens apparaissent de plus en plus comme des discours mensongers, les valeurs morales fondatrices sont très sérieusement mises en ballotage par les centaines de cadavres qui flottent en Méditerranée.

Victimes du capitalisme, les réfugiés le sont à double titre. Condamnés à l’exil pour cause de guerre provoquée par les lobbys pétroliers et les marchands de canons, ils vont trouver sur leur route d’ingénieux petits malins, modestes artisans indépendants ou membres d’organisations criminelles puissantes qui vont proposer, moyennant finance, de les amener à bon port  : les fameux réseaux de passeurs que les autorités désignent à la vindicte publique, pour mieux faire oublier leur propre responsabilité.

Le trafic d’êtres humains en fuite est devenu une activité lucrative, ce qui illustre de belle façon la perversion totale de ce magnifique système capitaliste qui ne néglige aucune source de profit, aussi misérable soit-elle.

La fuite devant les massacres et la misère peut s’avérer aussi dangereuse que les fléaux auxquels on veut échapper. Depuis l’année 2000, plus de 31 000 migrants sont morts sur les routes de l’exil dont 2460 en Méditerranée.

Sans une mobilisation importante des populations européennes, beaucoup de migrants risquent d’être refoulés. Déjà en Allemagne, un certain nombre de manifestations de solidarité se sont déroulées à proximité des centres d’hébergement qui avaient été inquiétés antérieurement par des démonstrations fascistes et xénophobes.

Beaucoup de lecteurs de ce journal gardent dans leur mémoire familiale l’hiver 1939  : venue de l’autre côté des Pyrénées, une foule innombrable tente d’échapper aux massacres franquistes et se presse aux postes frontières de la France qui leur réservera alors l’épouvantable accueil que l’on sait.
Les migrants d’aujourd’hui laissent derrière eux des régimes de terreur absolue (celui de Bachar el-Assad, celui de Daesh ou la sanglante dictature érythréenne). Notre solidarité leur est acquise. A bas toutes les frontières. Notre patrie c’est le monde, notre famille l’humanité.

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