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Retour sur la Fermeture des sites Michelin de Cholet et Vannes – Novembre/ décembre 2024

Publié le 27 avril

Après deux ans de chômage partiel, sous production, manque de matières premières, pannes récurrentes, formations bidons… Rumeurs… le 5 novembre 2024, les salariés, entassés dans un hangar pour l’occasion, ont reçu l’annonce de la fermeture définitive des sites de Cholet et Vannes pour juillet 2025. À Cholet, seul un atelier dit « Z », perdurera six mois de plus, le temps de transmettre le savoir-faire exclusif qu’il détient. C’est donc 955 personnes qui vont être licenciées à Cholet et 299 à Vannes. D’où le slogan majeur du mouvement « 50 ans pour nous user, 5 minutes pour nous virer »

Les ouvrier.ères n’auront que faire du lock-out de trois jours visant à garantir le temps nécessaire pour que la colère se décompense à domicile plutôt que devant la tôle. Le soir même, un piquet agrémenté d’une barricade de pneus enflammés est installé pour dénoncer la propagande lamentable de Florent Ménégaux, grand patron de Michelin, faisant endosser à la Chine la responsabilité de la situation. Sauf que tout le monde sait qu’il organise lui-même sa propre concurrence en implantant son groupe aux quatre coins du monde afin d’y exploiter partout, dans les pires conditions, le prolétariat. Engrangeant ainsi des bénéfices record dont il a pu se vanter sans scrupule, le 12/02/2025 : un chiffre d’affaires de 27,2 milliards d’euros et des bénéfices s’élevant à 1,9 milliard d’euros en 2024, ainsi qu’une hausse des dividendes par action, les actionnaires recevront donc près de 974 millions d’euros.

La lutte fut classique, incompétence pathétique des bureaucrates syndicaux, guerre de pouvoir, défilé de tous les opportunistes possibles, récupération à tout va, attaques habituelles de la direction... Tout cela pendant que les grévistes les plus déterminés s’échinaient avec ardeur à organiser : blocage, tractages, manifs, déplacements à Clermont et Vannes…

Le 14/11 un comité de grève parvient à être élu par l’AG du jour. Si l’organisation de la lutte s’émancipe des bureaucrates syndicaux, il n’en va pas de même de l’avant-garde révolutionnaire Trotskyste...

 De l’intérêt d’en être

Rejoindre un mouvement de grève local peut vite s’avérer décourageant face à la difficulté d’y trouver sa légitimité. Si en théorie les soutiens sont attendus, la réalité montre que l’accueil et le faire ensemble ne vont pas de soi. L’idée de perdre une miette de pouvoir ou de risquer de se faire déborder pousse certains bureaucrates jusqu’à l’hostilité. Depuis belle lurette, l’Interpro s’exprime principalement lors des appels nationaux et encore il est coutume de voir les journées se succéder : retraités, fonction publique, industrie… comme si nos intérêts de classe n’étaient pas communs ! La perspective que d’une boite faisant grève naîtrait un mouvement social et d’un mouvement social une révolution… semble une notion, utilement, tombée en désuétude. Diviser pour mieux régner.

Et pourtant, s’il est un endroit pertinent pour défendre et accroître l’autonomie ouvrière, y confronter Idée et Réalité, comprendre pourquoi et comment on agit, c’est bien celui de la lutte sociale.
Redonner sens à la Solidarité, l’Entraide et créer des rapports de confiance prend un peu de temps, mais cela en vaut la peine vu les liens qui peuvent s’établir. Le nomadisme de grèves en grèves laisse imaginer un possible pour reconstituer un réseau Interpro autonome.

 Riposter à la propagande bourgeoise

La posture de soutien crée une distance (émotionnelle, organisation…) propice à l’observation et l’analyse. Elle permet en parallèle de riposter aux attaques de la bourgeoisie et faire entendre une autre réalité.

Pour faire valoir son mépris de classe et justifier sa tyrannie, la bourgeoisie a toujours usé de calomnies. Particulièrement pendant les luttes, au cours desquelles, elle n’hésite pas à réduire la classe ouvrière au vote RN, à l’alcoolisme, à la chasse aux primes, à la fainéantise, à la culpabilité « viandards et consommateurs irresponsables », au saccage de l’environnement… et inonde sa presse de son fiel.

Partager le quotidien des ouvriers permet de nuancer tout cela et d’affirmer qu’il y a principalement un dégoût et un rejet de la question politique (assimilée d’emblée à la « politique politicienne »). Ainsi qu’un engouement pour l’abstention motivé par l’absence de perspectives meilleures (non pas par convictions anarchistes, malheureusement). Cependant, si la plupart des politiciens n’ont croisé qu’indifférence, certains ont été vertement chassés (Macronistes, RN, EELV).

De même, côtoyer le désespoir permet de politiser le recourt aux exutoires. Car, comment tout simplement supporter la misère existentielle et l’angoisse de la paupérisation ? Aucune morale ne solutionne l’oppression, ni ne fait oublier qui est responsable de l’inégalité économique et sociale. Et dans un tel système, prétendre qu’il suffirait de supprimer allocations chômages et RSA pour remettre tout le monde au travail… est criminel !
C’est pourquoi les futurs licenciés ne chassent qu’une seule chose, la précarité ! Le calcul est simple, avec les 40000 € proposés par le PSE, la survie est d’environ 2 ans 1/2. À peine le temps de retrouver un autre travail qui dans tous les cas sera forcément sous-payé : perte de l’ancienneté, aubaine pour le patronat local.

Quant aux fainéants, ce sont celles et ceux qui gagnent vos millions le temps d’une vie en 3/8… Alors, saluez donc riches heureux !

L’écologie aura été le sujet le plus affligeant et pour moi le plus marquant de cette lutte. La direction appuyée par la bourgeoisie locale s’est autorisée à donner des leçons de décroissance (la blague !) et à infantiliser les seuls moyens de lutte que possède le prolétariat. À l’instar de la religion, elle est devenue le nouveau pilier de la culpabilité et de la peur. Et c’est par ce biais que les dominants vont s’acharner pendant 10 jours pour lever le blocage de l’entrée principale.
Pourtant, des mesures ont révélé que, malgré ce brûlot de pneus, l’air choletais n’était pas plus pollué que ce qu’il a été depuis 50 ans que cette usine tourne.

Personne n’est dupe quant aux pleurnicheries à ce sujet. L’interdiction visait uniquement à étouffer l’expression de son désastre, non pas écologique, mais social. Car oui, la fumée noire était le symbole de la colère ressentie. Une colère noire et légitime. Une colère de résistance, de dignité et de fierté, de la part des personnes qui se sont vues jetées à la rue de la façon la plus crasse. Et comme dans tous les autres secteurs, à travers les PSE en pagaille ou la démolition des services publics, ce sont des vies, contre du pognon, qui se jouent ! Parce que le capitalisme n’a que faire des vies et de l’environnement, sa raison d’être étant uniquement de produire à outrance non pas pour le bien commun, mais pour remplir les poches d’une poignée de parasites.
Éteindre le feu n’était donc ni souhaité, ni souhaitable. Et dans le contexte géopolitique qui se profile, cette fumée noire pourrait bien se propager au fil des fermetures d’usines.

Pendant tout ce temps ? Qui s’est ému des conditions dans lesquelles travaillent les ouvrier.ères ? Qui parle des méfaits des 3x8 sur leur santé ? Des composants nocifs respirés ? Des locaux et des machines vétustes et dangereux, bourrés d’amiante  ? Des postures usantes ? De l’impossibilité de tenir jusqu’à l’âge requis pour la retraite ? Qui parle de l’absurdité de cette production, de son organisation ? Qui parle de pourquoi une partie de l’humanité est contrainte à fabriquer des pneus la nuit !!! Quelle nécessité autre que la folie du profit peut justifier cela ? Constat valable, non seulement, pour le secteur de l’industrie, mais pour l’ensemble du monde du travail ! C’est là que se tient le cœur de l’écologie, au fond d’un système politique, économique, social et sociétal complètement inégalitaire et complètement suicidaire !

La catastrophe écologique est le fait du capitalisme et la responsabilité doit être assumée par toutes ces grandes familles richissimes entourées de leur parterre d’actionnaires, qu’on appelle grands groupes ! Ainsi qu’à tous ses valets au service de son idéologie !

Alors bien sûr, celles et ceux et qui n’ont que leurs forces pour survivre, celles et ceux qui n’ont jamais droit à la parole, jamais droit à quelques décisions que ce soit dans cette société, et partout dans le monde, ne peuvent être porté.es responsables de quoi que ce soit !

C’est se tromper grossièrement de cible que de prétendre cela !
Il n’y aura de réelles écologies que le jour où les usines et les terres seront gérées par les travailleurs et travailleuses. Parce qu’alors la production aura une réponse rationnelle aux besoins, assurée par tous-tes et les richesses réparties équitablement.

La classe ouvrière connaît la science de sa misère et sait pertinemment qu’avec un smic à 11,88 € brut par heure, ce n’est pas elle qui exploite et épuise les ressources environnementales et humaines ! Elle est réduite à se loger, chauffer ou supporter la canicule, manger, se soigner, se cultiver, s’habiller et se déplacer comme elle peut et bien souvent dans les pires conditions ! Avec les seules miettes que les rapacités bourgeoises veulent bien lui laisser. La dégradation de l’environnement la touche de plein fouet et en première ligne. Les petits gestes du quotidien, qui n’ont pour bienfaits que de soulager la conscience de ceux qui ont les moyens d’en abuser, ont toujours été pratiqués par les classes populaires. Tout simplement parce qu’elles n’ont pas le loisir du choix ! Alors n’en demandons pas plus à ceux qui ont déjà peu ! L’écologie champêtre ne suffira évidemment pas à enrayer pollution, dérèglement climatique, disparition d’espèces, manque d’eau….

Le capitalisme n’est pas réformable, le processus de fabrication de toutes marchandises, dans ce système, implique, exploitation humaine et environnementale.
Prétendre l’Écologie possible en son sein est le discours indécent de « l’écologie bourgeoise », qui méprise les travailleurs et justifie, par des mesures antisociales et pro-patronales, toutes les dérives productivistes jusqu’aux licenciements mêmes !