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critique de la religion écologiste, pour une révolution écologique

Publié le 25 novembre 2018

L’écologie est-elle compatible avec le capitalisme ? France Culture intitula l’une de ses diffusions par cette question. L’un des intervenants participant à la discussion était Aurélien Barrau. Astrophysicien de son état, j’avais apprécié ses ouvrages de vulgarisation scientifique où se mêlent, entre autres, théorie du Big Bang et citations d’Antonin Artaud. Cet individu me paraissait des plus sympathiques. Revenant brièvement dans ses ouvrages sur ses affinités adolescentes avec le courant libertairei, il pouvait incarner la figure d’un « intellectuel contemporain », et quelqu’un me semblant de profondément humaniste. Ma déception suite à son intervention radiophonique fut à la hauteur des a priori favorables que j’avais à son égard.

Cela ne fait nul doute que l’écologie doit être une de nos priorités de réflexion et d’action. Je ne reviendrai pas ici sur l’état de la planète ni sur les alarmants rapports des climatologues, mais il est certain qu’il y a urgence ! Ne serait-ce que dans une perspective humaniste stricto sensu, l’Homme ne peut exister et évoluer que grâce à son environnement et les richesses que celui-ci lui procure. D’un mot enfonçant des portes ouvertes, s’il n’y a plus de Terre, il n’y a plus d’Humanité.

Les propos d’Aurélien Barrau m’ont néanmoins fait réagir quant à la forme des réponses écologiques à porter à notre monde. Dans sa bouche l’écologisme venait à se confondre avec une religion. Une religion sans Dieu, fait anecdotique au demeurant, mais une religion tout de même avec son lot de duperies, de manipulations et de déviances. Tous les éléments se trouvaient ainsi distillés au courant de son propos. Dans un premier temps la peur et la terreur de la fin du monde et de l’apocalypse. Face à la situation préoccupante que nous rencontrons reste à savoir quelle position adopter. Une réponse, posée, collective et fondée sur la raison ou, comme le laissait entendre le scientifique susnommé, une hystérie collective reposant sur le cerveau reptilien et nos instincts les plus primaires. Thème cher aux diverses religions, la crainte de la fin du monde, ou la punition divine, a pour conséquence de maintenir la population dans l’oisiveté et la soumission aux saintes écritures. Dans le cas qui nous concerne ce rôle serait tenu par les technocrates scientifiques et politiques inhibant de fait tout mouvement de contestation pouvant perturber leurs actions.
Cela nous mène vers la seconde analogie, le thème du sauveur, de l’homme providentiel. Dans son énoncé M. Barrau priait les politiques, et le terme prend ici tout son sens, de prendre en considération de toute urgence les préoccupations environnementales. Il désirait s’adresser à eux, comme s’ils étaient seuls à pouvoir apporter une solution et ainsi sauver notre monde. Rappelons que nous parlons des mêmes politiques qui depuis des dizaines d’années ont misé sur le nucléaire, ont dynamité le Rainbow Warrior, se sont rendus complices de l’exploitation des énergies fossiles pour des raisons pécuniaires et bien d’autres crimes contre l’Humanité sur lesquels il serait trop long ici de revenir. De par ce fait il évinçait toute remise en cause profonde du système actuel et de l’ordre établi. Il nous invitait ainsi à prêter allégeance à ceux-là mêmes qui sont la cause des nos maux.
Le troisième point de comparaison entre l’écologisme réformiste et la religion est le sentiment de culpabilité et la honte du péché originel. Il en est de ta responsabilité pauvre pécheur automobiliste si le monde court à sa perte, honte à toi qui n’utilises pas le sac jaune pour la poubelle bleue, etc. Soyons honnêtes, la chose publique (res publica) est l’affaire de tous, et la prise en considération de tout un chacun, d’autrui ainsi que de son macrocosme sont des thèmes qui nous sont chers. Mais pour reprendre une image cosmologique, certains corps exercent une force gravitationnelle infiniment plus grande que d’autres. Aussi la part de la pollution actuelle supportée par les géants industriels et l’agriculture capitaliste se trouve être sans commune mesure avec celle de l’individu lambda. Celui-là même est contraint au demeurant, par l’architecture capitaliste contemporaine, d’utiliser son véhicule pour aller travailler et survenir ainsi à ses besoins vitaux.

Un autre aspect nous a heurté dans le discours d’Aurélien Barrau. Celui-ci proposait dans son intervention d’employer des méthodes coercitives afin de contraindre la population à avoir recours à des méthodes plus responsables. Le chemin ici emprunté nous paraît dangereux. A l’instar des religions, l’utilisation d’un objet transcendantal, qu’il s’agisse de Dieu ou de l’écologie, peut mener à toute sorte de fanatisme, de dictature et de barbarie. Le fait de placer un objet ou une raison, au-dessus de la conscience d’appartenir à l’Humanité fut et sera le lit de toutes les tragédies de l’Histoire. L’écologie sera humaniste ou ne sera pas. Plutôt que de subir les réprimandes d’une autorité coupable de la situation que nous vivons, la pensée écologiste peut et doit se conjuguer avec un changement de société. Elle peut être un vecteur de désir du vivre avec, mais jamais une contrainte. En ce sens elle peut et doit s’inscrire dans un processus révolutionnaire, dans une refonte profonde de nos matrices de lecture du monde.

Au nom du pragmatisme, pour sauver la planète on nous astreint à être soumis et dociles. Non, c’est au nom du pragmatisme qu’il faut oser partir à la dérive vers l’absolui. Au nom du pragmatisme, car c’est à terme l’unique solution viable, il faut être révolutionnaire.

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