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HITLER & LES MENNONITES

Publié le 20 mai 2012

Message de félicitation adressée par l’église mennonite à Adolphe Hitler
lors de son accession au pouvoir, 10 septembre 1933  :

« La conférence des Mennonites de Prusse orientale et occidentale rassemblée aujourd’hui à Tiegenhagen (état libre de Dantzig) éprouve une profonde reconnaissance pour le puissant renouveau que Dieu a donné à notre nation par votre énergie et promet une joyeuse coopération dans l’édification de notre patrie par le pouvoir de l’Evangile, fidèle à la devise de nos ancêtres : "Personne ne peut poser d’autres fondations que celles qui reposent en Jésus". »

Réponse d’Adolphe Hitler à l’église Mennonite  :

« Je vous remercie sincèrement pour la loyauté et pour la bonne volonté à coopérer à l’édification de la nation allemande que vous avez exprimé dans la lettre que vous m’avez adressée. » Signé : Adolf Hitler.
Tels sont les termes des correspondances échangées entre l’église mennonite, issue de l’anabaptisme allemand, et le Führer nazi à la date cruciale de son accession au pouvoir.
Par sa brutale crudité, cet échange constitue un avertissement pour tous ceux qui, actuellement révoltés par les conditions sociales, pourraient être facilement trompés par un discours religieux masquant sa volonté sectaire de purification derrière un discours social, humaniste ou citoyen.

Le malentendu millénariste

Cette duplicité a fait de célèbres victimes. Par exemple, le marxiste Frédéric Engels, qui dans son ouvrage intitulé « La guerre des paysans » (1850), voulut faire de Thomas Muntzer un précurseur révolutionnaire. Certes, le prophète anabaptiste Thomas Muntzer prit la tête de la révolte paysanne de 1525. Mais c’était oublier qu’il avait initialement proposé aux princes allemands protestants de le rejoindre, pour qu’ils deviennent le glaive de dieu contre les hérétiques. Ce n’est que devant leur refus - lorsque les princes choisirent le camp de ses adversaires luthériens - qu’il engloba dans sa doctrine les revendications des paysans révoltés, aux seules fins de transformer leur mouvement en instrument de sa puissance.

Cette démarche opportuniste se vérifia autour des années 1530. Faisant suite à la guerre des paysans, une vague de révoltes urbaines se produisit en Allemagne au nom du « Règne des saints ». Elle allait l’emporter dans la ville de Munster. Arrivés au pouvoir dans cette commune, les chefs anabaptistes y imposèrent aussitôt une dictature sanglante en multipliant les exécutions d’opposants qualifiés d’hérétiques.

Le « paradis terrestre » imposé par des « Elus de Dieu » découvrait son vrai visage, celui de la plus horrible barbarie, de la persécution des consciences, du meurtre en série. Rien d’étonnant à cela. Comme le résume cette remarque de Norman Cohn à propos du prophète Thomas Muntzer : « A en juger d’après ses écrits, il se montra bien moins intéressé par la construction de la société future que par l’extermination massive qui devait la précéder » [1]. Bien que proclamant à gorge déployée qu’ils étaient les représentants de dieu - et donc qu’ils bénéficiaient de tout son soutien dans leur politique d’extermination massive - les anabaptistes finirent par être écrasés. Leurs héritiers n’eurent alors d’autre ressource pour survivre et continuer de propager leur funeste doctrine que de changer leur fusil d’épaule et d’emprunter des voies pacifiques (la suite montrera que ce ne fut que provisoire). C’est sur ces bases qu’un prêtre, Simon Menno, fonda une église dite mennonite encore florissante de nos jours dans de nombreux pays et dont la bourgeoisie a pu prospérer grâce a son agrarisme.

Du paradis terrestre à l’exploitation des terres

Les mennonites se focalisent en effet dès lors sur l’agriculture. Ils se transforment en colons et gèrent rapidement de vastes territoires en organisant une vie communautaire dont la cohésion repose sur « une foi de velours dans une main de fer ». De fait, des dictateurs qui ont compris les ressorts de leur fonctionnement, leur « confient » le développement de leur pays dans les « marches », c’est-à-dire dans les régions difficiles. C’est ainsi que la terrible tsarine Catherine II leur donna de riches terres à blé sur cette marge méridionale de l’empire russe qu’était l’Ukraine du 18e siècle [2]. De la «  Grande Catherine » au despote Alexandre II, les mennonites prospérèrent et firent fortune dans l’Ukraine tsariste, toujours avec l’appui inconditionnel du pouvoir.

En 1917, face à la guerre mondiale, face à l’oppression tsariste, face à la misère chronique dont ils crèvent littéralement, les paysans de toute la «  Sainte Russie » se soulèvent. Ceux d’Ukraine ne sont pas les moins actifs ni les moins organisés. Face à une société profondément inégalitaire, ils veulent l’égalité et le partage. Les riches mennonites qui chantent à longueur de temps les valeurs chrétiennes (dont le partage fait pourtant partie…) ne l’entendent pas de cette oreille. Foin des préceptes, foin du pacifisme, foin du «  Tu ne tueras point » et autres fadaises : ils organisent des milices armées pour défendre leurs propriétés et leurs privilèges. Le grand discours pacifiste, humaniste (on dirait aujourd’hui «  citoyen »), chrétien et autres fariboles s’évaporent comme la rosée du matin par un jour de soleil radieux. Dans les beaux jours de la révolution de 1917, les paysans makhnovistes mettront fin à la puissance mennonite en Ukraine [3].

Dès lors, les mennonites d’Ukraine, reprennent le chemin de l’Allemagne, une Allemagne qui petit à petit est en train de se convertir à l’hitlérisme. Et, nous bouclons ici avec le fameux message mennonite que nous avons mis en exergue de cet article, celui par lequel cette église promet une « joyeuse coopération » à Hitler, un Hitler qui ne doute pas de leur « fidélité ». Les mots, ici, sont d’une importances cruciales : «  joyeuse coopération » et « fidélité », le programme ne laisse place à aucun doute [4].

De l’aveu même des mennonites d’aujourd’hui « Le programme du parti Nazi faisait référence à un Christianisme positif qui plaisait aux Mennonites. Après avoir pris le pouvoir, les nazis prirent des mesures sévères contre les partis de gauche et aussi contre ce que des gens comme les Mennonites auraient considérés comme de l’immoralité publique » [5].

Le site des mennonites des USA dans lequel nous puisons ce commentaire se garde bien de dire qui sont ces « gens » que les mennonites considéraient (et, nous osons poser la question : les considèrent-ils toujours ?) comme de « l’immoralité publique ». Les homosexuels ? les Tsiganes ? les Juifs ? Les Slaves ? Les anarchistes ? Toujours est-il que les « mesures sévères » (insupportable euphémisme pour parler de l’extermination  !) prises par les nazis ne semblent pas les choquer. En effet, du moins dans ce commentaire, nous ne trouvons ni une phrase d’excuse, ni un mot de commisération pour les victimes. Le texte se présente plutôt comme une justification, une validation de la position historique des mennonites prussiens.

Il n’y a donc pas de doute : les assemblées de l’église mennonite de Prusse se sont reconnues dans la stratégie contre-révolutionnaire des corps francs nazis tout comme dans les accents délirants d’un Hitler éructant dans son Mein Kampf (écrit en 1924, soit une dizaine d’années avant le fameux message mennonite) : « Ainsi suis-je convaincu qu’aujourd’hui j’agis en vérité selon la volonté du Tout Puissant Créateur, en m’opposant au Juif je mène le combat du Seigneur » [6] propos qui font directement écho à ceux de leurs prophètes déments : « Chassez les ennemis du Christ du sein des Elus (…) Un homme sans foi n’a point le droit de vivre aux dépends de ceux qui ont la foi (…) Il faut utiliser l’Epée pour les exterminer (…)  » [7].

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