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Pourquoi je suis athée ?

Publié le 26 décembre 2016

On peut dire de certains livres qu’ils sont des drapeaux. La traduction en français par les Éditions de l’Asymétrie de « Pourquoi je suis athée ? » du libertaire indien Baghat Singh, devrait être le drapeau on ne peut plus actuel des libertaires du monde entier. On peut dire de certains livres qu’ils sont des combats. Cette édition qui regroupe des commentaires de militants athées et libertaires du monde indien et du monde arabe réengage un combat universel : sur toute la planète, au même titre que la lutte des classes, la lutte contre l’obscurantisme et le fascisme religieux est à l’ordre du jour.

Quand j’ai lu ces textes, j’ai pensé au sordide bruit de fond qu’on entend dans un certain milieu qui consiste à nier, parfois avec violence, l’existence et le sort de ceux qui meurent dans les pays sous dictature religieuse pour avoir défendu la Liberté et la Raison. Elle nous serine que, parce qu’ils vivent dans un autre continent que le nôtre, il faudrait taire le fait que ces militants athées et libertaires sont égulièrement massacrés par des islamistes, qu’il faudrait même aller jusqu’à taire leur existence.

Ce bruit de fond sordide voudrait étouffer les cris de révolte, par exemple ceux de Shammi Haqui et Ananya Azead qui nous expliquent qu’en Inde il n’a pas fallu 20 ans pour que se développe un extrémisme religieux bipolaire capable, tel un poison lent, de changer radicalement le tissu et le psychisme de la population. Elle voudrait les étouffer parce que ces cris nous alertent : la religion n’est une drogue apaisante qu’au début, à terme c’est un poison lent. Et on en connaît le résultat par avance, pour peu qu’on veuille bien ouvrir les yeux et les oreilles.

A l’encontre de ceux qui fabriquent ce bruit de fond et qui se réduisent au rôle de complice des fanatiques et des fascistes, ce livre nous rappelle que s’il n’existe pas de frontières géographiques – puisqu’ils habitent au même endroit – il existe des frontières idéologiques. Il est bon de souligner que nous ne sommes pas du même côté de la barrière que ces nouveaux négationnistes. Hier comme aujourd’hui et aujourd’hui comme demain, il existe bel et bien une frontière entre un fanatique religieux et un libertaire, il existe bel et bien une frontière entre un fasciste et un anarchiste.

Du coup j’en suis venu à une question, « No border » (Pas de frontières) disons-nous… Mais qu’est ce que ça veut dire de vouloir abolir les frontières géographiques sans combattre ce relativisme culturel qui nie à toute force l’existence et le droit à l’existence de nos compagnons du monde entier ?

Qu’est ce que ça veut dire de vouloir accueillir tout le monde sans combattre clairement ce bruit de fond sordide qui exclut de ce monde ceux qui ne pensent pas comme les puissants, les tyrans et leurs complices, veulent qu’on pense ? No border disons-nous, oui, mais encore ?

Relire l’histoire

Qu’est-ce qui a empêché en février 1939 les réfugiés espagnols de base d’être massacrés par les franquistes lancés à leur poursuite, si ce n’est l’existence de la frontière française ? Qui aurait eu intérêt, en 1939, à brûler le poste frontière du Perthus en criant « No border » ?

Inversement, en 1945, à l’instar du fils de Mussolini ou du chef des terribles oustachis, Ante Pavelic, un nombre prodigieux de fascistes se réfugièrent en Amérique du Sud. Les nazis y furent accueillis à bras ouverts, tels le tristement célèbre docteur Mengele. Ce médecin du camp de concentration d’Auschwitz, qui avait pratiqué sur les détenus d’horribles expériences, avait gagné l’Argentine en 1949, comble d’ironie sinistre, avec un passeport de la Croix Rouge. Quel sens cela aurait-il eu à cette période en Argentine de crier « Bienvenue aux réfugiés » ?

Poser ces questions c’est y répondre. Oui les libertaires sont pour l’abolition des frontières géographiques mais pas uniquement, surtout pas uniquement, car si l’on met sous le boisseau l’existence de frontières idéologiques on ne fait rien d’autre que de rendre possible l’avènement d’un monde totalitaire dirigé par un gouvernement mondial. Un pur cauchemar.

Alors comme l’écrit la sociologue algérienne Marième Helie Lucas, il faut

« … rappeler à tous ceux qui, ici même, nient notre histoire libertaire au nom d’une identité qu’ils supposent nécessairement religieusement définie et accordent un pouvoir politique croissant aux représentants des religions, que l’alliance morbide entre les prédicateurs religieux et les détenteurs du pouvoir constitue un suprême danger ».

« Pour rendre hommage aux blogueurs bengalis et saoudiens, aux militants pakistanais contre les lois sur le blasphème, aux dessinateurs français qui se sont battus pour notre liberté à tous » , il faut acheter « Pourquoi je suis athée ? » d’autant plus que les bénéfices des ventes seront reversés au site internet MUKTO-MONA (Libre Pensée) qui héberge les blogs de plusieurs athées bengalis.

Ce texte écrit en prison en 1 930 par Bhagat Singh, constitue un brûlot malmenant à la fois les religions, les castes et le colonialisme. Encore très diffusé aujourd’hui en Inde, il exerce une influence toujours déterminante sur les luttes contre tous les fanatismes, notamment celles des blogueurs, éditeurs et libres penseurs d’Asie et du monde arabe. L’édition de cette œuvre, en septembre 201 6, par les Editions de l’Asymétrie comprend des préfaces de Raihan Abir, éditeur du site Mukto-Mona , de Shammi Haque, blogueuse et activiste féministe de la Ganajagaran Mancha ( Mass awakening Platform / Plate-forme pour le réveil des masses ), et de Marieme Helie Lucas, sociologue, fondatrice et coordinatrice des réseaux Secularism is a Women’s Issue et Women living under Muslim Laws ainsi que des Postfaces de Chaman Lal, historien, JNU-Delhi, et d’Ahmedur Rashid Chowdhury (Tutul), éditeur, Shuddhashar. Le prix d’achat est de 10 euros

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