EMILE TRAVÉ

Publié le 10 juin 2010

Emile Travé, lutteur acharné de l’Idéal, nous a quitté. Né en Espagne vers 1915, travailleur du textile dès 14 ans il milite à la CNT. Pendant la révolution, il intègre la Colonne Durruti. Passé en France avec la retirada, il est interné dans divers camps de concentration de la République française. Pendant l’occupation il participe à la Résistance et prend part en 1945 aux combats pour réduire les dernières poches nazies de l’Atlantique. Il était alors membre du Bataillon Libertad, presque entièrement composé de libertaires espagnols.

En 1946, il participe à la création de la CNT-AIT française dont il allait être nommé secrétaire, tout en continuant à militer à la CNT espagnole de l’exil. Dans les années 1960-1970 il profita de ses voyages pour « affaires de famille » à Rubi pour assurer des contacts avec les compagnons de l’intérieur. Après la mort de Franco, il s’oppose à la transformation de la CNT espagnole de l’exil en une régionale de l’extérieur, qui pour lui n’avait alors plus de sens, et ne milita plus dès lors qu’à la CNT-AIT française.

Mais, Emile, c’était avant tout une personnalité entière, généreuse et chaleureuse. Je me souviens de notre première rencontre. Nous étions en 1996, dans le bus loué par les compagnons de Pau pour aller au Congrès de Madrid de l’AIT, où devait se régler la question de notre dilemme avec la partie réformiste de la CNT, connue aujourd’hui sous le nom des Vignoles. Je venais de rejoindre la CNT depuis quelques années, et j’étais impressionné face à ce que je me représentais comme un « monument de l’histoire de l’anarchisme du XX siècle ». Mais Emile dissipa très vite cette impression, tout naturellement  : il était allé directement s’asseoir au fond du bus sur la banquette arrière, celle des chahuteurs, où nous avons passé le long trajet à parler, rire et chanter. Arrivé à Madrid, il était là, vitupérant contre les réformistes. Pendant le congrès, très attentif et clairvoyant, il déjoua en les exposant publiquement les manœuvres de coulisses des réformistes, alors qu’ils essayaient de faire pression sur certains vieux délégués (notamment de la FORA) pour qu’ils changent leur vote.

Il était comme ça Emile : aimant la vie, l’amour, blaguant, poète à ses heures, capable de grande tendresse comme de colères énormes, mais toujours sérieux et sans compromis quand il s’agissait de l’Idéal.

Emile était de ses personnages qui vous marquent pour la vie, un Don Quichotte de l’idéal. A notre fidèle lecteur, à notre ami, nous disons au revoir compagnon, que la terre te soit légère. Puisse ton exemple de lutteur infatigable continuer à nous inspirer.
T.

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