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Le Mouvement socialiste libertaire égyptien

Publié le 17 février 2014

Le Mouvement socialiste libertaire égyptien à vu le jour le 23 mai 2011, au lendemain de la révolution qui a balayé Moubarak.

Ses militants sont la cible d’arrestations et de campagnes de calomnie orchestrées par les médias aux mains de l’État et des Frères musulmans.
Malgré cela, le MSL mène d’intenses actions d’information : tracts, tags, pages internet, soutien aux grévistes, organisation de réunions de quartier et de rue, actions comme «  Brûlons la Constitution  » (qui a connu un grand écho)...

Ils cherchent à répondre à la question que tout le monde se pose en Égypte («  Quelle alternative ?  ») en popularisant les concepts d’autogestion et d’auto-organisation.

Nous reproduisons volontiers certains de leurs textes afin que chacun connaisse mieux ce mouvement.

  QUI SOMMES NOUS ?

Le Mouvement Socialiste Libertaire est une organisation communiste-anarchiste qui lutte pour une société sans classes, une société antiautoritaire, débarrassée de l’appareil répressif de l’État et du capital.

Nous sommes du côté des classes opprimées, des aspirations des revendications des ouvriers, petits agriculteurs, simples employés ; nous sommes du côté de tous ceux qui n’ont que leur force de travail à offrir et qui refusent d’être exploités.

Nous croyons à la démocratie, non pas à la démocratie parlementaire, mais à la démocratie directe, au système des comités de quartier, d’assemblées populaires, à l’organisation d’assemblées de délégués de villes et de villages qui seraient révocables à tout moment et qui n’auraient aucun pouvoir décisionnel, leur tâche consistant à transmettre les décisions prises collectivement dans les assemblées générales.

Nous sommes pour l’abolition de la propriété privée, nous nous opposons au monopole des moyens de production par le capitalisme, nous sommes opposés au travail rémunéré quel qu’il soit.

Nous sommes favorables à l’autogestion des unités.

Nous sommes favorables à l’autogestion des unités de production et des coopératives, et à la rotation des tâches, pour que les gens aient accès aux richesses du pays et pour répondre ainsi aux besoins de tous.

Nous sommes favorables à la formation d’unités de protection et d’autodéfense dans les quartiers, dont la gestion serait locale.

Notre projet de société s’articule avec les aspirations des classes opprimées, libérées des chaînes du capitalisme esclavagiste sur la base « de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins ».

  Origines de la révolution égyptienne

Beaucoup de mouvements politiques, de politiciens s’autoproclament «  pères spirituels  » de la révolution égyptienne. Ils martèlent sans cesse qu’ils en sont les initiateurs. Tout cela n’est qu’un tissu de mensonges. Nous connaissons tous le rôle indéniable des grèves successives des ouvriers et travailleurs égyptiens qui ont mené, des années durant des luttes contestataires acharnées, notamment :

• la grève des cheminots et ouvriers du Kafr-El-Kebir de 1984,
• la grève des travailleurs d’Isko de 1986,
• la grève des travailleurs du « Métro & Tunnels » de 2002,
• la grève des ouvriers du textile de Mahala El-Kebir en 2006,
• la grève héroïque des employés des impôts fonciers de 2007 et toutes celles qui ont suivi.

Toutes ces actions ont constitué le terreau de la révolution. La révolution, avec plus de 500 grèves a fait trembler le régime et a abouti à la chute de Moubarak.

Cette révolution est celle des ouvriers, paysans, travailleurs, simples employés, qui ont su transmettre la lutte de génération en génération. Prolétaires égyptiens, ne les laissez pas vous voler votre révolution. Les fruits de la révolution ne sont pas au rendez-vous car ce n’est pas fini. La lutte doit continuer car la répression continue de plus belle contre les manifestants, les grévistes dont les actions sont criminalisées par le ministre de l’intérieur : des dizaines d’arrestation ont eu lieu pour trouble à l’ordre public, incitation à la grève, attroupement illégal et vandalisme.

Quand aux patrons, appuyés par l’appareil d’État, ils menacent de licencier les grévistes et les syndicalistes indépendants. La multinationale Pirelli, basée en Italie, a procédé au licenciement de 300 intérimaires, au gel des salaires. Elle menace de fermer purement et simplement les usines «  si nécessaire  ». A noter que Pirelli ne respecte même pas les lois en vigueur en Égypte et n’a jamais été inquiété pour quoi que ce soit. Il en est de même pour l’entreprise des mines d’or Sukri et pour l’entreprise nationale de métallurgie Sawirs. Ajouté à cela, les nouvelles lois répressives, restrictives sur les libertés et les droits des travailleurs, passées en catimini par les Frères musulmans au pouvoir, renforcent encore plus le capitalisme et l’impunité des patrons voyous.

Nous appelons à la solidarité tous les travailleurs, quel que soit leur domaine, nous les appelons à briser l’isolement dans les entreprises et à s’associer aux autres mouvements ouvriers, à se serrer les coudes quand l’un d’entre eux est menacé.

Nous sommes une force incroyable, mais nos divisions nous rendent fragiles et inefficaces.

Arrachez vos droits des griffes des pilleurs et criminels qui vous exploitent  !

  NOTE SUR LES DÉBUTS DE L’ANARCHISME EN ÉGYPTE

L’anarchisme existe en Égypte depuis environ 140 ans. Il est apparu avec l’arrivée d’ouvriers italiens et grecs, appelés pour faire tourner les usines égyptiennes, les hommes d’affaire préférant confiner les agriculteurs locaux dans la production de coton, produit très prisé par les occidentaux, d’où l’importation de main d’œuvre étrangère (NDLR : européenne en l’espèce  !).

La main d’œuvre italienne et grecque travaillait dans des conditions lamentables. Progressivement, ces travailleurs se sont fondus dans la société égyptienne. Ils représentent les pionniers de la classe ouvrière égyptienne actuelle. Le premier syndicat de travailleurs a vu le jour en 1872 sous le nom d’ «  amicale des travailleurs », à l’initiative de travailleurs grecs, et en 1877 le premier journal anarchiste («  Les travailleurs  ») était publié à Alexandrie, en italien.

En septembre 1878, Enrico Malatesta, anarchiste italien, étant contraint de fuir l’Italie pour échapper à la police, s’installe en Egypte ou il trouve une dynamique chez les travailleurs italiens. Il participe même à une manifestation devant le consulat italien d’Alexandrie pour protester contre l’arrestation de plusieurs anarchistes.

En 1882 éclate la première grève des travailleurs contre l’entreprise du canal de Suez à Port- Saïd. Les anarchistes y sont présents en masse. La même année, le président de l’association des travailleurs italiens d’Alexandrie adresse une lettre aux révolutionnaires égyptiens, ayant à leur tête Sami Pacha Baroudi, dans laquelle il exprime l’appui total des travailleurs italiens à la révolution arabe contre le colonialisme.

En 1884, publication du journal anarchiste « La question sociale », toujours en italien. En 1890, l’État interdit les actions syndicales en Égypte. Les travailleurs répondent à cette provocation par l’augmentation des actions syndicales.

Le 18 mars 1894 : parution du journal « L’Étoile ». Un travailleur grec est arrêté pour distribution de tracts anarchistes. Publication du premier texte fêtant l’anniversaire de la Commune de Paris de mai 1871, se terminant par les mots « Vive l’anarchie ».

En 1849 : importante grève des travailleurs du canal de Suez et fondation du premier syndicat de la chaussure en Égypte, grâce aux militants anarchistes dont Saklaridis Yanakakis.

En 1899 éclate une forte grève des travailleurs du tabac. Les anarchistes sont massivement présents. Parmi eux, l’égyptien Mohamed Sentiki et l’anarchiste juif égyptien Salomé Goldenberg.

  Travailleurs des administrations du secteur de la santé unis pour leurs droits

Le deux octobre 2012, les grévistes des administrations du secteur de la santé d’Alexandrie ont affiché une solidarité sans faille. Malgré le silence assourdissant des médias, ils étaient là, intérimaires, employés de bureau, ingénieurs et simples salariés, unis pour leurs droits devant le siège de la direction.

Le lendemain, ils ont rejoint leurs collègues intérimaires du ministère de la Santé pour un sit-in devant le siège de la direction de la Santé d’Alexandrie, banderoles et pancartes à la main pour soutenir leurs collègues.

Leurs revendications  :

• alignement du cadre spécial des employés de l’administration de la santé sur celui des médecins,
• titularisation de tous les intérimaires,
• augmentation de la prime de fin de contrat et alignement sur les primes des autres ministères,
• salaire minimum garanti pour tous,
• dissolution du syndicat des travailleurs du ministère de la santé,
• établissement d’un cadre pour les ingénieurs et fonctionnaires du service juridique de la santé selon le nombre d’années d’étude,
• avantages et primes de rendement de 30 % à tous les salariés et non pas seulement à la Direction et autres hauts responsables,
• application de la décision du ministre de la santé (loi numéro 240) qui leur est favorable.

Les travailleurs restent déterminés et combatifs. Ils appellent leurs collègues des autres villes à être solidaires avec leur mouvement et les invitent à constituer un syndicat indépendant pour continuer la lutte.

  Le paysan égyptien, un anarchiste qui s’ignore

En observant le paysan égyptien, on se rend compte qu’il est fondamentalement anarchiste. Par exemple, tous les villageois participent à la récolte des uns et des autres. Même procédé pour l’arrosage. Tout le village participe à l’achat des tracteurs et autres machines agricoles, d’autant plus que les parcelles sont petites. Il n’est donc pas nécessaire de posséder des machines à titre personnel.

De là naît la solidarité spontanée, l’autogestion et l’auto-organisation ; car chaque individu a besoin de l’autre et cela s’applique aux problèmes qui sont résolus à l’amiable après concertation collective du comité de village, sans avoir recours aux autorités.

L’agriculteur égyptien pourrait mener une vie paisible, si ce n’était le bras de fer que lui imposent les capitalistes, les spéculateurs, les bourgeois, les bureaucrates et la Banque du développement agricole et de l’association des coopératives agricoles. Toutes les institutions sont les ennemis des agriculteurs. Les intérêts des crédits bancaires sont exorbitants, la spéculation sur le matériel agricole bat son plein. Tout est détourné vers le marché noir pour asservir l’agriculteur et le spolier.

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